vendredi 27 janvier 2012

Vincent VIALA : "Mes deux L"

Ce « Mes deux L » a été un des premiers disques que j'ai eu le plaisir de découvrir de retour « à la maison » il y a de cela quelques mois. Une sensation d'agréable surprise à la saveur persistante au fil des écoutes. Et si j'ai tant tardé à le chroniquer c'est précisément parce que son auteur n'habite pas si loin de chez moi et que du coup j'ai souhaité le rencontrer. Cette certaine proximité paralyse un peu. Il est finalement plus difficile d'écrire sur quelqu'un que l'on connait, même un tant soit peu, craignant peut-être de décevoir. Aussi, il y a cette volonté toute personnelle d'éviter l'écueil du copinage ; celui de la petite promotion arrangée en réseau : se  sentir obligé d'écrire quelque chose de flatteur  parce qu'on connait la personne. Mais à la première écoute, je ne savais pas qui était le coupable de ces notes de piano en forme de goutte d'eau. Et de toute façon, écrire sur un disque  qu'on aime pas ne fait pas partie de la politique éditoriale de ce blog (et voilà....).

Vincent Viala se définit comme un pianiste de jazz.
Disons plus simplement qu'il est pianiste.
Le jazz, est selon lui davantage une attitude, une façon d'être qu'un style précis, codifié à l'ennui et sagement balisé. Ce sont la rencontre et l'écoute de l'autre, la composition en temps réel (...l'improvisation !) et l'audace dans la capacité de proposition et de renouvellement qui l'ont  initialement attiré, mais nullement l'aspect élitiste d'une musique de caste souvent trop enclin à se contempler le nombril en mode autarcique. C'est pourquoi, au fil de sa carrière, il a multiplié les projets aux colorations variées, du funk à la chanson française, trimballant discrètement son piano habité par l'esprit du jazz.
Le présent album au titre sibyllin est le premier effort solo de Viala. Un passage que l'on peut  ressentir comme  obligé, au mitan d'une carrière, le piano étant ce riche orchestre à deux mains qui se suffit à lui-même se confondant en harmoniques. C'est aussi un album entièrement écrit, confrontation du monsieur seul face à lui-même. Là, la composition n'est plus en mode instantané et on s'éloigne sensiblement de l'idiome jazz : on joue du piano, c'est tout. Petit clin d'oeil au classique au passage.
On dénombre au total  treize morceaux, écrits et compilés sur une période de deux ans. Totalement indépendants, ils se déroulent cependant l'un après l'autre dans une parfaite fluidité, chacun venant se poser en contrepoint du précédent, respiration ponctuée de profonds silences, entre.
Les paysages proposés et traversés sont à la fois intimistes, vastes et mouvants. Errances pianistiques qui s'égrainent au sein d'une parenthèse contemplative.
Les mélodies semblent souvent fragiles,  évidentes comme une chanson que l'on arrivera cependant pas à fredonner. Un thème se dessine, aussitôt sabordé par une rupture tonale ou rythmique qui  happe et entraine sans but précis apparent, gracile appel du vide de ces petites prises de risques indicibles.
On peut le rapprocher d'un certain Gonzales, pour ces  miniatures exquises, certes beaucoup moins directes. Keith Jarreth (ou Michael Nyman), bien sûr, parrainage revendiqué. Mais là s'arrête le jeu des correspondances, les influences majeures de Viala se nichant dans le titre.
« Mes2L » donc.
Loin d'une envolée, on reste les pieds bien ancrés sur terre : un L pour Loire,  un pied dans l'eau, certes ; l'autre réservé à une personne qui lui est chère.
Ce fleuve sauvage, contemplé de manière quotidienne est une source d'inspiration abstraite, les éléments de fluidité, de temporalité et de mouvements imprégnant  chaque composition. Plus directement, Vincent Viala retranscrit sur partition toute cette palette d'images furtives et obsédantes.  Les remous, pas si loin. Roseaux qui ondulent sous les vents. Contre-courants rédempteurs. Caresse de la brume.
La deuxième L ? Il me semble que tout a presque été dit plus haut, les pulsations graciles de sa mine de plomb à cette elLe venant posément illustrer le propos du disque.
Petit voyage d'automne se jouant des tourbillons, la tête jamais loin de la ligne de flottaison.

L'Un
Vincent VIALA : "Mes deux L" (2011)
contact : mes2L [@] voila.fr






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